Aujourd’hui poésie. Aujourd’hui dystopie.
Dystopie
Dans mon cauchemar
Les corridors de vents créés par les tours font tourbillonner les poussières toxiques
Et viennent nourrir un smog de plus en plus dense
Dans mon cauchemar
On se ruine à construire un troisième lien
Et j’ai honte d’habiter un village d’arriérés
Dans mon cauchemar
Les grosses poches et la mafia des agents immobiliers transforment la vie de quartier en labyrinthe individualiste.
Dans mon cauchemar
Il n’y a plus de coopérative ni de logement, les familles sont contraintes de louer des chambres à la petite semaine comme des touristes.
Dans mon cauchemar
Les radio-poubelles sont jouées non seulement dans les maudits autobus mais aussi dans les cours d’école.
Dans mon cauchemar
Les humoristes envahissent toutes les scènes et l’argent public réservé à la littérature finance des torchons populistes et sexistes.
Dans mon cauchemar
Des fonctionnaires décident de remplacer les jeux d’adresse et d’équilibre dans les parcs pour enfants par des masses en plastique et des écrans hystériques.
Dans mon cauchemar
Tous les artistes se sont convertis au numérique et les entrepreneurs créatifs n’ont d’intelligent que leurs outils de communication.
Ce n’est qu’un cauchemar
Quand j’ouvre les yeux pis que je te vois, gens de Saint-Jambe
C’est encore possible de rêver
Tout en gardant l’œil ouvert
Le bandeau du projet Vies de quartier est une œuvre collective d’Hélène de Saint-Jambe, en collaboration avec Malcom Reid, Pishier, Xavier Bélanger-Dorval, Marc Boutin et Edmé Étienne
En 2016 j’ai initié et dirigé un projet de médiation culturelle nommé Vie de quartier. Un journal éponyme, écrit et illustré par les résidents de Saint-Jambe et à propos de leur quartier, a été distribué gratuitement, de porte en porte, à près de 6 000 exemplaires.
J’y avais publié quelques poèmes et dessins. Je les partage avec vous, accompagnés de quelques gravures de Bill Vincent, l’un des artistes de Saint-Jambe y ayant participé.
La maison bleue dans Saint-Jean-Baptiste, gravure de Bill Vincent, 1976 (courtoisie)
Espaces sonores
Instant de grâce
hors de l’église
La cloche sonne
Par-dessus le tumulte
de la cour d’école
*
Piaillement multiple
L’arbre rue Saint-Olivier
a pour feuillage
Cent mille oiseaux
*
En arrière, gravure de Bill Vincent, 1979 (courtoisie)
Point d’ordre
au conseil de quartier :
Veuillez cesser le vacarme
Réveillez sur-le-champ
l’homme qui ronfle
à tout rompre
*
Est Sainte-Anne de Beaupré, gravure de Bill Vincent, 1977 (courtoisie)
Coulée de phares
Inversion du volcan
au petit matin
Vrombissement des périphéries
Mouvement de la banlieue
vers le centre
L’hémorragie des voitures
phares grand ouverts
Lave de lumière aux sillons des routes
Le jour éclate sur la ferraille peinte
La radio fait état
de la circulation
Frise de bâtiment, selon les dessins de Marc Boutin (courtoisie)
Pour voir l’ensemble du projet Vies de quartier :